LA CAROTTE

LA CAROTTE, Hu Luo Bo

La Carotte, Hu Luo Bo 胡萝卜 est connue pour ses vertus médicinales depuis des millénaires en Chine. C’est une plante bisannuelle de la famille des Apiacées appelées anciennement Ombellifères. C’est sa racine pivotante charnue que nous consommons.   

A l’heure actuelle, c’est le légume dont la culture est la plus répandue sur terre, 35% de la production mondiale venant de Chine.

Au départ, elle était blanchâtre, très ligneuse et uniquement réservée à la médecine. Ensuite, à force de croisements, elle a pris la couleur orange que l’on connaît et est devenue légume courant.

L’ancêtre de la carotte proviendrait de la région appelée aujourd’hui l’Afghanistan. Ensuite elle envahit toute la planète. Les grecs et latins ne s’en servaient que pour leurs vertus médicinales, en particulier au niveau des yeux, mais très peu en cuisine. Elle fut domestiquée en Orient dès le 10e siècle.

Bien qu’il existe tout un panel de couleurs, je vais m’intéresser, dans cette étude, à la carotte orange que l’on connaît tous.

C’est Pierre Doris qui disait : « Pourquoi en parlant de la police des polices, on les nomme « bœuf-carotte » ? Parce que quand ils t’attrapent ils te laissent mitonner à petit feu ! »

Et Robert Sheckley  qui disait : « Pour la carotte, le lapin est la parfaite incarnation du mal ».

Que dit la médecine chinoise ?

La carotte crue  est de saveur très légèrement amère et  piquante.

Beaucoup moins cependant que le navet.Ce goût disparaît d’ailleurs totalement à la cuisson. Elle devient alors douce. Nous savons que la saveur douce, sucrée a comme propriété de favoriser la production de sang et d’énergie, de même que les liquides organiques. Elle humidifie l’organisme et agit comme fortifiant général.

Sa nature est  modérée, neutre. Cependant, en tant qu’alicament, elle est considérée comme très légèrement rafraîchissante et lubrifiante. 

C’est un légume qui sera donc bon à consommer pour les personnes qui sont en état Xu, de faiblesse.

Les vertus thérapeutiques de Hu Lui Bo vont aller prioritairement vers les méridiens et les organes : 

  • Poumon,
  • Foie et
  • La rate

*Une de ses principales propriétés est de « décontracter et de dégager le diaphragme en favorisant le travail de la digestion de l’intestin et de l’estomac. »

Il est dit « que la carotte élargit le milieu, fait baisser le Qi et dissipe les stagnations perverses au niveau de l’estomac ». Ceci est dû au fait que la carotte tonifie la rate qui est le chef d’orchestre de la digestion du bol alimentaire. C’est donc un légume très utile en cas d’indigestion, de ballonnement, de distension abdominale.

La carotte est très précieuse chez les enfants dénutris, anémiques et qui n’ont pas d’appétit. Une très bonne recette dans ce profil de déséquilibre : « Couper en lamelle dans le sens de la longueur  une belle carotte bio. La faire revenir dans une poêle  ou un wok avec de l’huile de sésame en y rajoutant de la ciboule et du gingembre frais coupé en petits morceaux »

*Une autre propriété très intéressante est celle d’humidifier  les intestins, de lutter contre la sécheresse du gros intestin. N’oublions pas que Poumon et Gros Intestin sont directement liés en M.T.C.  et donc l’action de tonifier le Poumon a un effet direct sur les problèmes de constipation, de selles sèches. 

La carotte est donc considérée comme un laxatif doux.

Par exemple, le fait de boire en 4 ou 5 fois par jour 40cc (un petit verre) de jus de carotte fraîchement extrait permet de lutter contre la constipation commune. L’action peut être augmentée quand on prend du jus de carotte avec du miel.

*Une autre action. Nous avons vu qu’un des « logiciels-organes » cible de la carotte était le Foie. Or, nous savons que les yeux en M.T.C. sont l’ouverture du Foie. Par cette action de nourrir le Foie, les textes anciens disent que « la carotte « éclaircit » les yeux ».

En effet, ce légume pris régulièrement a pour action de lutter contre la baisse de l’acuité visuelle, ce que l’on appelle l’héméralopie. Elle permet aussi de lutter contre la sécheresse des yeux.

Une recette traditionnelle en cas de fatigue visuelle :

«  On coupe en lamelles dans le sens de la longueur une carotte bio. On la fait sauter dans de l’huile de sésame. On y ajoute 30 gr de céleri branche coupé en morceaux et 30 gr d’algue laminaire réhydratée. Ce plat se consomme avec du riz et l’idéal est de rajouter du foie de volaille ou d’agneau ».

*Elle agit aussi directement sur  l’énergie du poumon. Non seulement elle favorise la lubrification, l’humidification de cet organe, mais surtout elle augmente ou rétablit l’action fondamentale du poumon qui est de faire descendre l’énergie vers le bas.

Toutes ces actions permettent donc à ce légume d’être un très bon antitussif et de lutter contre les inflammations chroniques du poumon.

Traditionnellement, les Chinois savaient qu’il fallait consommer beaucoup de ce produit, lorsqu’un enfant présentait une coqueluche avec une toux très sèche.

Une recette traditionnelle consiste à :  « Cuire à feu doux 250 gr de carottes et 1 douzaine de jujubes préalablement ouverts dans un litre d’eau. Une fois que la décoction est réduite à 1/3, on la boit en plusieurs fois ».

Une autre recette très intéressante est de :

« Prendre du jus de carotte coupé avec de l’eau chaude dans lequel on rajoute un peu de miel dans le cas de toux sèche ».

*N’oublions pas que peau et poumon font partie du même logiciel en M.T.C. 

En Chine, la carotte est réputée pour donner une belle peau. Les Chinois recommandent de consommer ce légume quand on a la peau sèche ou rugueuse. Mais aussi en cas de démangeaison du cuir chevelu ou de pellicules.

Le jus de carotte pris par petites cures de 9 jours à raison de 3-4 petits verres de 40cc peut avoir effectivement un effet de rajeunissement des tissus.

*Aussi bien dans la médecine chinoise que dans la médecine traditionnelle africaine, la carotte a une action fondamentale au moment de la rougeole. Je vous renvoie à mon livre « Secrets de Centenaires » au chapitre sur les vaccinations pour comprendre ce qu’est cette maladie en M.T.C. Les médecins chinois disent que c’est une maladie nécessaire qui a toujours existé et qui permet, dès le plus jeune âge, à l’enfant de se débarrasser des toxines, présentes dans le sang, qu’il a hérité du sang maternel. Le but du jeu est donc de favoriser au maximum l’éruption des boutons qui ne sont que l’extériorisation de ces toxines. 

La carotte joue ce rôle fondamental. À force d’éliminer coûte que coûte cette maladie infantile, on favorise plus tard, l’apparition d’eczéma ou de psoriasis.

Elle permet aussi, en agissant sur le poumon, de prévenir  les risques de complication pulmonaire ou tout au moins de les atténuer. Pour augmenter  cet effet, on rajoute dans l’utilisation de la carotte, sous forme de jus ou cuite,  de la coriandre.

*Enfin, dans le Yi Lin Zuan Yao, il est dit que « la carotte humecte les Reins, tonifie le Yang originel, le Yuan Yang, réchauffe le foyer inférieur et enfin élimine le froid et l’humidité ».

C’est pour cela que ce légume est plus ou moins contre-indiqué quand on est en excès important de Yang.

Que disent les recherches modernes, quant aux effets de la carotte ?

Toutes ces recherches ne font que conforter les dires de la tradition. Voyons quelques effets.

*Un dicton populaire dit que la carotte « rend aimable et donne les fesses roses ».  Amabilité est, entre autres, à mettre en relation avec un bon fonctionnement du Foie.  Les fesses roses, c’est le poumon….

*Elle présente un pouvoir hématopoïétique, à savoir qu’elle stimule la formation des globules rouges (Rate en M.T.C). Elle possède donc d’importantes propriétés antianémiques.

*Elle favorise la sécrétion lactée.

*Elle renforce la résistance de l’épiderme à l’agression des rayons ultraviolets.

*Elle a comme particularité d’avoir une très haute teneur en carotène, précurseur de la vit A, essentielle pour la constitution de la rétine et de la cornée, et donc aussi pour la vision nocturne.Cette vitamine permet aussi de favoriser la croissance, la cicatrisation, la reconstitution des muqueuses. En usage externe, la carotte possède des pouvoirs cicatrisants et désinfectants. Il faut alors déposer de la pulpe de carotte crue sur des plaies ou des brûlures.

*D’autre part, le carotène contenu dans la carotte est un très puissant antioxydant qui permet d’éliminer les radicaux libres (Tan en M.T.C.), cause de vieillissement précoce,  de maladies cardiovasculaires et de cancers.

Modes d’utilisation

On peut consommer la carotte crue, sautée, bouillie, en jus, à la vapeur, en purée, en soupe.

Il est évident que pour que ces propriétés soient optimales, il convient de se tourner vers les légumes de culture biologique. Ensuite, il convient de consommer des carottes jeunes et surtout éviter qu’elles soient flétries, ternes et ramollies, car elles deviennent alors indigestes. Elles doivent être sans tâches, ni odeur de moisi. Attention aux grosses carottes qui risquent d’être particulièrement dures.

La peau peut être consommée, car elle est très intéressante en tant qu’alicament, à condition que le légume soit bio et surtout bien lavé. On ne devrait pas l’éplucher, mais les brosser sous un jet d’eau courante. Quand vous faites des carottes râpées, citronnez-les immédiatement, car elles noircissent au contact de l’air. Si vous les râpez trop tôt elles perdront une grande partie de leurs vitamines.

Les fanes de carottes sont excellentes en potage.

Pour congeler les carottes, laver, gratter légèrement, couper en rondelles ou en dés et blanchir en les plongeant 30 secondes dans l’eau bouillante puis dans de l’eau glacée pour les refroidir. Eponger avec du papier absorbant ou un torchon propre. Emballer dans des sacs congélation, vider l’air, fermer hermétiquement.

Autrefois, les carottes étaient conservées pendant plusieurs mois par couches dans le sable horticole, comme d’ailleurs les panais, les betteraves ou les châtaignes.

Conclusion

Vous avez compris que ce légume devrait tenir une place centrale dans notre diététique. Hormis quelques cas spécifiques, dont je vous ai parlé plus haut où il est possible de faire des cures de neuf jours, s’arrêter une semaine et reprendre ensuite, il convient de ne pas prendre en permanence de ce légume. Ce n’est pas parce que l’on va en prendre tous les jours pendant un an que l’on va rajeunir de 20 ans !

N’oubliez pas la règle des « neuf jours » que j’enseigne dans mes cours de diététique et qui dit en résumé que : « On ne devrait pas consommer le même légume, le même fruit, la même protéine (c’est différent pour les céréales) pendant neuf jours d’affilée. Comme il y a 18 repas en 9 jours, cela sous-entend que manger deux fois de la carotte en 9 jours est largement suffisant ». Il y a bien d’autres légumes à notre disposition. Toujours avoir en ligne en tête  cette règle : « Consommer les légumes de saison et de région, et être le plus varié possible ».

Pour finir, un peu de poésie :

La carotte n’est pas cornichon

La carotte est à poil tout près d’un potiron
Subtile influence de l’attraction lunaire
Et les poils se dressent comme des militaires,
Au garde-à-vous bandés, prêts pour leur mission;

Mais sans la capote, seuls les cornichons
Se mouillent à prendre des plaisirs délétères . . .
Énorme légume jouissant de la terre,
Surtout ne tombe pas dans ce piège à bâton!

Il a bon ton bon teint, ce joyau du jardin;
“Organiquement sain”, conclut la médecin
qui goûte des lèvres cette chair tachée

“Ce ferme membre à poils des non-légumineuses,
n’a dans ses racines point de vice caché.”
(Sauf pour les lecteurs aux. . . pensées libidineuses).

Rolland PAUZIN, 2002