Le Navet, Luo Bo
Le navet est un légume très ancien, cultivé sur les cinq continents. Il a toujours été considéré comme un légume, mais aussi comme un alicament.
C’est un des légumes les plus consommés en Chine, mais aussi certainement un des légumes les plus puissants au niveau de la médecine.
Il existe un dicton populaire qui dit : « Qui mange un navet, gagne une année ».
Le nom chinois du navet est Luo Bo.
On consomme surtout sa racine. Il en existe de plusieurs formes différentes. Nous avons ainsi :
– Les navets longs de couleur blanche. Celui qui est long et mince est le meilleur. C’est lui qui prioritairement sert d’alicament.
– Les navets à corps gros et court. Ils peuvent être verts ou violets et servent surtout en tant que légumes, car ils ont plus de chair, bien qu’en cuisine, on puisse aussi utiliser les longs.
NAVET BLANC
Commençons donc par nous intéresser au Luo Bo, au navet blanc.
C’est lui qui est le plus consommé en Chine. Nous allons voir que c’est l’un des produits les plus utilisés pour expulser le Tan.
Je vous rappelle que le Tan est le terme générique en médecine chinoise pour signifier tous les amas, les stagnations de quelque origine qu’elles soient. Autant de déchets que le corps n’a pas pu expulser et qui peuvent, à la longue, se transformer en poisons, ce que les Chinois appellent « Du ».
Fondamentalement, il y a deux manières de le cuisiner et de le consommer cru ou cuit.
Quand on l’utilise comme alicament, on ne le cuit pas, on le consomme cru. Le cuit sert comme aliment, bien qu’il ait aussi d’importantes vertus médicinales.
Vertus thérapeutiques selon la médecine chinoise.
Le navet blanc cru est de nature froide-fraîche (comme d’ailleurs la plupart des aliments qui poussent sous la terre).
Sa saveur est alors piquante.
Par contre, quand on le cuit, il devient de nature modérée et surtout son goût devient sucré.
Les organes et les méridiens cibles sont ceux des :
-
-
- Poumons,
- de la Rate,
- du Gros Intestin,
- de l’Intestin grêle,
- de l’Estomac et
- des Trois Foyers.
-
Pourquoi le Poumon ? Parce que, entre autres, selon la théorie des signatures, la couleur blanche et la saveur piquante sont à mettre en relation avec l’énergie de cet organe.
C’est pour cela qu’il est dit « qu’il traite la chaleur résidant dans le Poumon ».
Quand il est cuit, il devient sucré et on sait qu’en pharmacopée chinoise, la saveur sucrée permet de lubrifier et de rafraîchir le Poumon.
Quand il est cru, sa saveur piquante dissout donc le Tan au niveau du Poumon et surtout aide le Poumon dans sa fonction descendante de l’énergie évitant ainsi les stagnations au niveau de celui-ci.
Je vous rappelle qu’une des conséquences de la stagnation d’énergie au niveau du Poumon est la production de Tan sous forme de crachats, de bronchites chroniques entre autres.
Pour son rôle sur le système digestif (rate, gros intestin, intestin grêle, estomac, Trois Foyers), on l’utilisera surtout cuit.
Cru, il a donc comme propriété principale :
-
-
- De dissoudre le Tan.
- De faire circuler le Qi, l’énergie surtout au niveau de sa fonction descendante, qui est à mettre en relation avec le Poumon.
- Grâce à sa nature fraîche, il peut guérir les inflammations de la gorge.
- Mais aussi, il permet d’éliminer l’accumulation de chaleur due à l’alcool et au tabac. Nous savons que la saveur piquante est très puissante pour enlever la « chaleur-humidité » du corps. C’est pour cela que le piment est principalement utilisé dans les climats chauds et humides.
-
Quand il est cuit, nous avons vu que cela lui faisait perdre sa propriété piquante et qu’il devenait sucré, Gan en chinois.
Son rôle principal, là aussi, est :
-
-
- de dissoudre le Tan,
- de neutraliser les produits toxiques,
- de rafraîchir la chaleur,
- de dissiper ce que les Chinois appellent « les amas de nouilles ».
-
N.B. Rappelons-nous que les Chinois sont les inventeurs des pâtes, des nouilles. Elles sont principalement consommées dans les zones centrales, alors que le riz pousse là où il y a de l’eau. Comme c’est leur plat principal, si au moment de leur consommation, ils n’appliquent pas les règles basiques à savoir :
– Les mâcher au moins 20-30 fois pour les transformer en sucre lent.
– Prendre les dérivés du blé le plus complet possible.
– Ne les mélanger à aucun autre ingrédient dans la bouche pour permettre cette transformation optimale.
– Les accompagner obligatoirement de légumes qui, grâce à leurs fibres, vont faciliter leur digestion.
– Dans le cas contraire, toute cette ration très longue à digérer va stagner et « pourrir » dans l’estomac. C’est ce que les Chinois appellent « amas de nouilles »
NAVET VERT
Le navet vert est de nature plus fraîche que le blanc, et il reste toujours frais, même quand il est cuit.
Son action principale est de dissoudre, d’expulser le Tan. Il convient de ne pas le prendre trop souvent justement à cause de sa nature froide.
Par contre, il est excellent quand on veut s’en servir en tant qu’alicament. Ces effets sont identiques à ceux du navet blanc, mais plus puissants.
NAVET VIOLET ROND
On les utilise prioritairement avec les blancs dans la cuisine.
Ils ont comme particularité, comme les autres d’ailleurs, de contenir énormément de fibres qui vont aider à augmenter le péristaltisme intestinal et à nettoyer les villosités intestinales.
Modes de préparation
Il existe beaucoup de manières de le préparer. En effet, il peut être consommé :
-
-
- cuit,
- cru,
- sous forme de jus ou
- réduit en poudre.
-
Cuit, il entre donc dans une multitude de préparations culinaires.
Il peut aussi bien accompagner des plats à base de poisson. Il peut être consommé avec de la viande.
C’est un des composants essentiels des soupes.
Par exemple, une soupe à base de morceaux de bœuf et de navets a comme propriété de rafraîchir et de tonifier le poumon.
À l’instar des Chinois, les Arabes connaissent bien cette utilisation. Dans un couscous, de manière systématique, ce légume doit être présent.
Il permet de digérer entre autres la viande de mouton et le blé qui deviennent nocifs s’ils stagnent dans l’estomac.
Cru, il peut être coupé en morceaux, râpé. Il peut donc être aussi réduit en poudre ou bien on peut en tirer du jus avec un extracteur.
Quelques exemples d’utilisation.
@ En cas, par exemple, de maux de gorge importants avec des crachats très épais et difficiles à expectorer, consécutifs à un état que l’on appelle de « chaleur-humidité » située ou au niveau du Poumon ou au niveau de la Rate Estomac.
Ce Tan peut alors être facilement éliminé en pulvérisant de la poudre de navet blanc dans la gorge, ou en buvant quelques gorgées de jus de navet.
Comme la poudre est très piquante, il est préférable pour un Occidental non habitué à certains traitements un peu « forts » de boire très doucement quelques gorgées de ce jus de navet cru.
Ne dit-on pas que certains ténors consommaient du bouillon concentré de Luo Bo pour s’éclaircir la voix avant d’entrer en scène.
@ En chine existe une recette très connue. On prépare une décoction avec de la menthe (Bo He), de la poudre de navet blanc. On rajoute un peu de miel à cette décoction et on la donne à l’enfant en cas de maux de gorge avec crachats.
Cette décoction est très utilisée quand on mange trop d’aliments de nature chaude et grasse. Par exemple, trop de viande, trop de blé non accompagné de légumes, trop de produits tonifiants, par exemple du ginseng en excès.
Il faut savoir qu’à force de vouloir prendre de manière exagérée des produits toniques comme justement un excès de ginseng, cela peut se retourner contre l’organisme et favoriser l’apparition de blocage, de stagnation au niveau de l’estomac.
Les symptômes les plus classiques sont alors :
-
-
- des douleurs et des ballonnements au niveau de l’estomac que les Chinois appellent « gêne au niveau du diaphragme »,
- une toux grasse qui accroche dans la gorge,
- des nausées, mais sans parvenir à vomir,
- l’envie d’aller à la selle mais sans y parvenir.
-
Quand on prend un petit verre de Luo Bo cru, cela peut désobstruer l’estomac et favoriser l’évacuation des selles.
@ Le jus de navet cru , surtout du navet vert, servait en Chine pour lutter contre les états Zao Re, de « sécheresse-chaleur » qui blessent l’énergie du Poumon.
Et une des premières causes de cet état était l’utilisation du charbon à outrance. Les signes peuvent alors être :
-
-
- des douleurs de gorge,
- des saignements de nez,
- des douleurs dentaires,
- des rougissements au niveau des yeux,
- des inflammations buccales à type d’aphte par exemple.
-
@ On peut aussi consommer de petits verres de Luo Bo cru (blanc ou vert), pas plus de 40cc à la fois, soit un petit verre arabe ou une petite tasse chinoise, lorsque l’on a « tout sur l’estomac », que l’on n’arrive pas à digérer.
Ce jus permet donc de lutter contre les amas d’aliments non digérés dans l’estomac.
Il est à noter que pour augmenter cette action, il existe en pharmacopée chinoise des préparations à base de graines de navet, Lei Fu Zi. La saveur de la graine est piquante et peut effectivement dissoudre le Tan.
@ Je vais vous donner une recette que les Chinois ont l’habitude de préparer avant de consommer un gros repas de fête.
On râpe très finement du navet blanc cru.
Ensuite on se procure dans n’importe quelle épicerie chinoise du Hai Zhe, de la « méduse de mer séchée ». C’est un met très courant en chine.
Elle est normalement conservée dans du sel. On la fait dégorger, on la nettoie avec de l’eau et on la coupe en tout petits morceaux.
On mélange donc le navet et la méduse et on y rajoute un peu d’huile et du vinaigre. Ce plat est servi en tant qu’entrée.
Il a, au départ, un goût très piquant mais qui ne tient pas en bouche. En prenant un tel mets en entrée, on est quasiment sûr de bien digérer ce repas Xiang Shou, « de fête ».
@ Encore un autre effet. La peau en physiologie chinoise fait partie intégrante du « logiciel Poumon ».
Pris régulièrement en tant que légume ou sous forme de jus, c’est un produit très puissant pour lutter contre l’acné. Entre autres, parce que ce produit fait circuler l’énergie du Poumon, enlève le Tan et s’oppose aux stagnations.
@ Des recherches modernes ont pu montrer que la consommation régulière de Luo Bo, de navet, quel qu’en soit son mode de préparation, permettait de réduire de façon très significative les risques de cancers du sein, des poumons, de l’estomac et de l’intestin.
Je vous renvoie pour cela à mon livre Zhong Liu pour comprendre comment on peut se créer pas à pas ce type de pathologies. À la lumière de tout ce qui vient d’être dit sur ce légume, on comprend cet extraordinaire pouvoir de prévention (fibres, élimination du Tan, circulation de l’énergie, etc…).
Conclusion
Si vous n’aviez qu’une seule chose à retenir, quant à une consommation régulière de ce légume, c’est son action « anti-Tan », anti-amas d’aliments.